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Un an de toi, c'est aussi un an de moi. Une mousse au chocolat et on y va !

Janvier, mois de moi, une année de plus à chaque fois.

Je chéris de me célébrer à la montagne : le froid, la neige, le silence me bercent et m’apaisent. Tout alentour, des tas de gens dansent, vibrent la joie. Et, puisqu’en moi il y’a toi, à mes côtés, il y a aussi ton papa.

-362. Dernier week-end à deux. Ce soir, j’ai dansé, savouré les basses comme s’il s’agissait d’une nouveauté. Probablement parce que je dansais avec toi, mon bébé. 21h30, j’ai 29 ans. Toi, dans quelques jours, tu auras quelques jours.


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-363. Quelques contractions se sont fait sentir ce jour, espacées au point de me faire oublier leur lancement. Je reste attentive à leur rapprochement, toutes les heures, toutes les demi-heure, ai-je appris. Je sens le repos m'appeler de tout son soûl, une sensation de dernière fois me parcours l’échine. Nous choisissons de dîner au restaurant. Le lieu, agréable, la nourriture, délicieuse, je ne sais plus ce que nous avons mangé, mais c’était succulent.  Je prends du plaisir, j’oublie la fatigue. Nous rentrons tard, si tard que l’oreiller hurle mon prénom, je me couche aussitôt. Mes yeux se ferment lourdement ; le sommeil m’emporte, jusqu’à la première contraction. J’escompte un repos de quelques heures avant la grande aventure mais une seconde contraction me surprend, douloureuse. Suivie d’une troisième, d’une quatrième, j’attends qu’elles passent, tente de les oublier. Après une dizaine d’entre elles, je décide de m’installer dans la salle de bain de notre chambre d’hôtel afin de laisser ton papa se reposer. Un de nous devra être présent, solide, après la grande traversée.

Je sens la vague arriver, ce tremblement, la sensation d’avoir l’utérus cloisonné et si dense tout à la fois. Je m’ouvre, accueille les sensations, l’impression de changer de dimension lorsque j’atteins l’apogée, le sommet de la vague. Elle me quitte en laissant un relâchement profond, presque de la paix.

« On m'a parlé des vagues, j'y ai découvert le ressenti envahissant et enivrant, la montée en puissance de la douleur, du pic dépassant le seuil de tolérance suivi de la redescente, la libération du corps, de l'esprit, laissé dans la sensation d'un monde à découvrir. Je surf sur celle-ci avec beaucoup de courage, surprise par toutes ces sensations contradictoires : la peur de cet instant, si puissant, de l'après, de l'arrivée de ton petit corps chaud, posé sur le mien, de l'excitante joie de ta rencontre, ainsi que de la mienne en tant que mère, de la récupération de mon corps, léger après toi. »

Je chronomètre pour avoir un repère temporel : 40 secondes de contractions, 7 minutes de répits. La prochaine houle arrive, des sons gutturaux s’échappent alors que je m’accroche au lavabo. J’accueille, pleinement, totalement, dans un flou transformateur. La vague s’en va, subsiste la fierté. Une envie de nid m’emmène récupérer les coussins sis sur le lit, tes frères chiens m’examinent, circonspects, ne s’agitent guère. Je décroche les serviettes que je pose au sol, les arrange en un logis chaleureux, j’ajoute les coussins, au creux de cette salle de bain. Connectée à ma louve, à ma meute, je hurle sans bruit. Une baignoire m’invite dans ses eaux chaudes et, bien que l’eau soit ma compagne de voyage, je n’ai aucune envie de me mouiller. Les contractions se poursuivent, oscillent entre 30, 40 secondes, toutes les 6 à 8 minutes, irrégulières. Je suis dans l’incapacité de me reposer avec ses douloureuses ‘’sortie de corps’’. C’est à cela qu’elles me font penser : un voyage chamanique où chaque instant me rapproche un peu plus d’une vérité indicible, inexprimable, un dessein imprimé sur mon âme. Chemin personnel, pourtant si universel, profondément ancré dans ma féminité.

A 6h, j'inviterais ton papa à prendre la route, tranquillement. J’espère après un petit déjeuner, la mousse au chocolat m'a ravie tout le week-end ! Je sais que rien ne presse, je peux débuter seule cette danse, avec toi, mon petit. J’ai à cœur de te recevoir dans la douceur, le calme d’une vie tamisée. Avec ton papa, nous avons pensé à ton arrivé : un accouchement physiologique, sans péridurale, ni autres médications, dans l’eau d’une maternité à quelques cent kilomètres de chez nous. C’était sans compter la centaine de kilomètres supplémentaire, partant des montagnes enneigées, sur une route à la fraîche poudreuse. J’aime tellement les flocons qui virevoltent, ils rendent tout plus dangereux et si poétique. Les contractions, assise dans une voiture, c’est une sacré aventure. Ton papa sait mon amour des Disney, je suis un jukebox bien rodé : je chante les paroles comme pour la première fois, étourdie d’hormones dans l’envolé d’un déchirement. La route est longue, suivie d’un arrêt à la maison, quelques préparatifs de dernière minute, un appel à la maternité, un chargement de valises, et nous revoici en piste, sous un voile laiteux. Hôpital, dilatation insuffisante, on habite loin, on m’envoie promener, au sens propre. Nous marchons 2 heures au bord d’un lac, je m’accroche à ton papa quand mon utérus se contracte et se dilate. S’accroit l’intensité de la douleur. Retour à l’hôpital, incertitudes, changement d’équipe, ils décident que nous passerons la nuit ici.

Où que j’aille, j’emporte une quantité de petites choses pour mettre une touche de moi, pour me sentir comme à la maison, parfois mieux encore. Je vide la valise, dispose quelques talismans et autres amulettes, coupée dans mes élan par un appel de naissance. J’allume une bougie « Madeleine de Proust » achetée pour l’occasion, ton papa installe des foulards sur les lampes, notre mode de vie, c’est le cosy.

Invitée à prendre une douche supposée m’aider à accompagner la dilatation de mon Être tout entier, je me jette à l’eau, pendant qu’elle ruisselle sur nos corps de futurs parents, j’entre dans un rouleau. Hydratée, je me sèche avant d'enfiler mon pyjama Roi Lion. Je m'assoie sur le ballon, roule, grogne, attrape ton papa, me pend à lui à l'aide d'un foulard aux zébrures colorées. Je traverse les remous en respirant profondément pour ne pas me laisser surprendre par l'apnée.

22h de contraction, toutes les 7 minutes, soit environs 187 contractions plus tard, je m’allonge, épuisée, vidée. Je voudrais juste dormir, ne serait-ce qu’une heure. Couchée, la position m’empêche de prendre la vague. C’est un tsunami, suivi d’un second, dans la minute, ils me submergent. La douleur m’emporte dans un abyme. La panique a pris le lead, ma respiration se saccade. « Je ne vais pas y arriver, c’est trop dur ! » Ton papa a des paroles rassurantes mais je ne parviens pas à me reprendre, à remettre de la douceur dans cet instant si intense et bouleversant.

23h. L’infirmière nous invite dans la salle de monitoring, allongée sur la table, les contractions sont si douloureuses. Entre deux, je m’endors 3 minutes, peut-être 4. Ce sommeil est parsemé d’étranges images, de mots sans sens qu’il me faut dire à ton papa, j’ai l’impression d’entrer dans un grand délire. Une heure s’écoule, une difficulté à attendre ton cœur me force à tourner dans tous les sens. L’infirmière s’en va. Une fois, deux fois. Elle revient avec l’annonce d’un départ en césarienne. « Je refuse ! » Ce n’est pas ce qui est prévu ! Je veux la baignoire, je veux le calme. Je veux attendre. Le gynécologue se joint à elle, annonce la sentence : code rouge, nous n’avons plus le temps. Une nouvelle contraction me noie, la douleur est insoutenable, la raison me souffle que, endormie, je ne sentirais plus rien. Je titube dans le couloir alors que on me déshabille. On n’avait pas pensé à ça. J’ignorais même que cela était possible, naïve. Novice. Primipare.

« Il a frappé bien des fois, le fracas qui édifie ma vie. Celui auquel je n'aurai pu penser fut celui de ton arrivé. J'avais tout prévu : la physiologie, la confiance en mon corps, la lumière tamisée, une bougie qui sent la maison, les grigris fabriqués par les copines ainsi que ceux que j'ai choisi, je ne dirai pas méticuleusement mais avec mon cœur au demeurant. »

La médecine prévoyait ton arrivée au 22 janvier, je savais que tu serais là avant, j’avais imaginé comment, force de désillusion couplé à la brûlure de la pose d’une sonde urinaire. L'anesthésiste caresse mes cheveux, embrasse presque mon front. « Ça arrive, madame, tout ira bi… » Je dors déjà.

Mes yeux s’ouvrent sur un plafond blanc, un regard croise le mien, la bouche appartenant au dit regard demande comment je vais, je demande après toi. Mon ventre est si vide. « Votre bébé va bien. » Un courant glacé s’empare de mon corps, je grelotte, l’intérieur des os gelé. Sous la couverture, l’infirmière fait passer le tuyau d’un chauffage, quelques secondes suffisent à faire remonter ma température. Je me sens mieux. « Vous voulez aller en chambre ? » Je secoue la tête, négative. Je réalise : tu n’es plus là, au creux de mon ventre mais à présent tu seras partout. J’ai peur. Peur de te rencontrer. Peur de ne pas t’aimer.  Patientes, les soignantes laissent le temps s’écouler, et enfin décident de me guider vers toi. Les plafonds défilent sous mes yeux éblouis, jusqu’à l’arrêt du lit devant une pièce sombre. Un homme y est assis, une couverture rose dans les bras. C’est ton papa. Il approche, laisse découvrir ton visage, ce visage si doux, plein de promesses et de merveilles. Je fonds, les larmes et mon sourire accueillent ce grand changement. « Tu le veux ? » Non. J’ai peur, trop peur. Je ne sens plus mon corps, et si je te blesse ?

Passer d’un lit à l’autre rend réelle mon éventration, une douleur me cloue avec nausée. Installée dans mon cocon, papa te dépose délicatement contre mon corps, tu cherches le sein qui t’as tant manqué depuis que tu es né. La connexion s’établi, tes yeux fatigués trouvent les miens, émerveillés, l’amour s’immisce dans mon cœur, mon petit bonheur. Je nous offre 48 heures, 48 heures de peau à peau, 48 heures de retrouvaille, 48 heures d’odeurs. 48 heures de colostrum. 48 heures avant de te poser, de t’habiller. 48 heures pour réparer l’absence, pour réparer la rencontre. 48 heures pour apprendre à s’aimer pour l’éternité.

 

Jour +365 : Joyeux anniversaire, petit d’homme. Mon fils.

  12 mois à vérifier l'humidité de tes plis, en nettoyer ton nombril de miettes non identifiées, 12 mois à te caresser le dos, te chatouiller les pieds, te chanter des chanson pour te faire cesser de pleurer. 12 mois à t’observer, te voir évoluer, 12 mois de transformations, les tiennes, et les miennes.

En 12 mois j'ai appris des parts de moi, en ai enterré certaines, j'ai passé un coup de brosse sur mon pelage opaque, détachant des touffes de poils morts. Je descends chaque jour davantage dans des profondeurs insoupçonnées, des lieux irréguliers, nébuleux et désorganisés. Je me vois, m'observe, m’élever à tes côtés. Désireuse de t'apporter une effusion d'amour conjointe à une grande et belle dose de clarté, une forme de vérité, de transparence, d'ouverture, de fluidité. Je connais la force des bases solides nées de l'amour donné par une maman, je promets de te donner ces fondations, profondes et pérenne.

Malgré cela, elles sont nombreuses les soirées où, excédée, je rêve de légèreté, de liberté, de grand large. Et devant tes grands yeux olive je n'en mène pas large, je mets de côté mes frustrations, souris, continue de donner mon âme pour te faire sourire, voir ces 4 dents qui me font mourir d'amour.

J'apprends à être pleinement moi, tout en déconstruisant ma personnalité chaque jour, à tes côtés tout est redondant et étonnamment neuf. J'apprends à être une meilleure personne, quelquefois les lèvres serrées, la langue mordue, les larmes aux yeux, à voir mes angles et mes ombres afin qu'elles ne s'écrasent pas sur toi. Sur un cheminement personnel, je dépoussière des reliquats d’attentes envers les autres, attentes duquel mon bonheur prétend. Je ne veux pas faire de toi ma source de joie, alors je me guéris, ramène de la joie et des rires dans ma vie. J’ai fait des faits des drames qui plombent mes élans, mes effusions de moi. Je souhaite que mes déviations servent à éclairer ta voie, que mes douleurs balisent tes choix, sans les alanguir.

J’ai probablement grandi davantage durant les 365 jours depuis toi que sur les 10588 jours les précèdent. Tu ne me dois rien, ta vie est un cadeau, je te l’offre avec tout mon amour.

             

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