La dépersonnalisation ressemble à de la possession
- catherinesonnet
- 7 juin 2021
- 5 min de lecture
Ou comment le Diable prend le contrôle de notre vie.
D’où nait cette dépersonnalisation ? De nos traumatismes.
Ces derniers trouvent leur source dans la multitude d’événements ayant -ou ayant eu- lieu au cours de notre vie. Un traumatisme n’est pas forcément quelque chose de grave, type : maltraitance, sévices, abus, trahison… Un laps de temps perçu comme trop long entre le début des pleurs d’un bébé et l’arrivée de sa mère pour le nourrir peut être vécu comme un évènement traumatisant car il active la peur de la mort. Plus les traumatismes sont récurrents (et plus ils sont violents), plus la personnalité s’en trouvera altérée, pouvant aller jusqu’à des troubles cliniques (TDI, bipolarité, schizophrénie, …). Ici, je ne développerai pas les troubles pathologiques. Je vais parler de la création d’une personnalité dite protectrice, celle qui permet à un individu de grandir dans le chaos, celle qu’il faudra quitter à un moment donné. Un peu comme un homard qui change de carapace. C’est ce moment précis, celui de la mue, qui se trouve être le plus douloureux, car il est pure vulnérabilité. Lorsqu’un homard change de carapace, il est dénué de maison, de bouclier. Petit être mou et sans armure, il est à la merci de tout prédateurs. L’être que nous sommes y est semblable en tout point, lorsque l’instant de la grande modification tinte le coup final. Après avoir façonné une personnalité durant de nombreuses années ; parfois 20 ans, parfois 45 ou encore 60 … son abolition n’est pas seulement déstabilisante, elle est assassine. Voir la construction de soi voler en éclat après avoir passé sa vie à la bâtir, en voilà, en traumatisme. L’ultime. Que reste-t-il de soi lorsque plus rien de résonne en notre centre ? Que reste-t-il lorsque tout ce que nous pensions être se révèle comme n’étant que poudre aux yeux ? Les « crises de la quarantaine » en sont l’exemple parfait. Mais qu’est-ce qui nous pousse à la cassure ? Tellement de composants… Les hormones, le temps qui passe, les difficultés de la vie, la redondance de celle-ci, l’ennui, les enfants qui quittent le nid, les parents qui périssent, des contrats qui se finissent, … La restructuration prend ses racines dans toutes les bulles de nos vies : relations humaines, relations au matériel, relations au faire, relations à l’avoir. Lorsque l’être n’est pas la préoccupation centrale, vient un temps où il s’impose à soi, accompagné des questions existentielles que nous nous posons tous à un moment donné de notre existence : Pourquoi suis-je là ? Quel est mon rôle ? Ai-je une mission particulière ? A quoi je sers ? Que dois-je faire ? A quoi sert ma vie ? Pourquoi ce travail/cette relation/cette ville/cette maison/ … ? Bla-bla-bla. Toutes ces questions qui ont bien le droit d’être et qui dénotent à elles seules que notre place n’est plus la bonne. Dés lors qu’il y a questionnements, il y a réponses : la question est la réponse. Ce qui est sûr n’interroge pas. Cela est, et cela se suffit.
Faisant suite à la naissance de ces interrogations, notre être se trouve aspiré dans un vortex de doutes et d’incertitudes, remettant en causes tous nos choix, nos actes, notre chemin jusqu’alors juste mais qui n’a plus tellement de sens à la vue de nos yeux actuels.
Lorsque nous avons vécu des traumatismes successifs dans notre enfance/adolescence, nous avons créer un avatar de nous-même. Un personnage incarnant à merveille le rôle que nous lui avons attribué, souvent sans nous en rendre compte. Nous lui avons créé de nombreux masques afin qu’il se fonde et se protège dans une masse trop dense pour lui. Flirtant avec les différentes facettes de la vie et les individus gravitant tout alentour. Certaines personnes vivent avec leurs masques leur vie durant, (D’autant plus dans les « anciennes générations », où le développement personnel, la thérapie et la spiritualité n’étaient que paganisme, supercherie, ou acte clinique. Temps où seules les religions pouvaient prendre une place prédominante dans les esprits. -Religions ne permettant pas la pensée individuelle, arguant que « le monde est monde parce que Dieu l’a souhaité ainsi », ne laissant pas place aux questionnements, ne laissant pas place à la découverte de soi. Il s’agit en réalité d’une très mauvaise lecture, visant à asservir les peuples, alors que la foi n’est que libération et amour pur, mais j’y reviendrai dans un autre article. -), d’autres choisissent -ou se trouvent forcées- de laisser tomber leurs costumes d’âme, laissant place au homard qui vit en eux, accédant à leur vulnérabilité, sans filtres et sans artifices, laissant la douleur inhérente à la découverte d’eux-mêmes prendre possession de ce qu’ils ont pourtant tenté d’être durant un temps étant leur infini personnel. Laisser tomber les masques… c’est tellement actuel. Tellement dans l’air du temps, et je n’avais l’image du covid avant d’écrire cette phrase, elle vient se greffer en cet instant, précisant mes termes avec une acuité déconcertante. L’époque se veut développement et complétude de soi, découverte de son être et démasquage de son visage, montrant au monde sa personnalité propre. Peut-être est-t-il temps de laisser transporter les sourires que nous cherchons depuis tant de temps, dans notre Occident abîmé par l’abondance que nous ne sommes même plus en mesure de voir, allant même parfois jusqu’à la nier. J’espère sincèrement, pour toi, que tu as usé de cette période pour te questionner sur ton authenticité, par rapport à toi-même pour commencer. Vas-tu continuer à te mentir ? Vas-tu continuer à jouer ce rôle qui ne te correspond plus ? Ou vas-tu choisir de changer de casting ? Peut-être même jusqu’à réécrire le script de ta vie ?
Après la dépersonnalisation ne peut qu’apparaitre la création du Soi nouveau ; revisité, restauré. Régénéré.
Une partie des individus vont jusqu’à approcher l’enfer, découvrant alors qu’il n’est ni sous terre, ni sur celle-ci, mais tout bonnement en nous. Sis au creux de notre centre, au même endroit que notre cœur, lui qui s’avère être notre divinité. Le purgatoire tient sa place à côté de notre paradis personnel. Une fois visité en long et en large, nous avons le choix entre nous y établir ou le quitter, tout en ancrant son exacte localisation, en vue de ne pas y faire un détour lors du prochain coup d’épée engendré par une vie que nous ne pouvons maîtriser. Cela n’est qu’une question de choix, ils apportent la relativité, la restructuration, la confiance, la stabilité. Si nous prenons le temps de nous apprendre, notre balance interne reste stable lorsque les chocs se succèdent.
Visiter l’enfer, c’est apprendre à différencier ce qui est pour nous amour de ce qui est désolation. Ainsi nous pouvons prendre notre baluchon et entamer le voyage du héro en soi, prêt à la route qui l’attend dans les méandres des jours qui se suivent sans différer dans leur caractère inédit.
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