Covid et Gandhi, l'humanité bipolaire
- catherinesonnet

- 26 janv. 2021
- 4 min de lecture
Je suis quand même effarée de voir nombre de mes contemporains comparer les mesures actuelles, certes liberticides mais visant néanmoins, et quoi que l'on en dise, la protection de la santé des plus fragiles, aux mesures répressives prises jadis par des dirigeants peu scrupuleux. Non mais, vraiment, n'y a t'il pas une donnée manquante à vos propos révoltés ? Nous voilà là, à manifester contre des restrictions causées par... Un virus. Laissez-moi vous dire que nous vivons en effet quelque chose d'inédit. Je ne peux m'empêcher de ricaner lorsque j'ouïe dire que le gouvernement fait mal son travail, voire pire, que "tout cela, c'est de sa faute". La faute à qui ? Machination et supercherie mondiale. Plan de restructuration. GREAT RESET. Tuons les plus précaires, les inutiles, et gardons les riches, ceux qui injectent à l'économie ce dont elle a besoin pour tourner. Ah, parce que tu crois que nous, humains, nous contrôlons les virus ? "Qui tue t'on ? Lui oui, lui non, lui oui, lui non... Ah, quoi que, si, en fait, lui aussi". Heum. Certains doivent avoir obtenu un prix nobel en épidémiologie ici.
Je comprends ceux qui souhaitent recommencer à vivre, moi-même qui ne sors pas outre mesure (voire pas du tout Catherine admets le, assume donc ton a sociabilité naissante) je rêve de m'agglutiner dans une boîte de nuit bondée, troquer un verre de Gin contre un sourire, puis faire semblant de m'intéresser à celui me faisant face, bien qu'au fond ; je le méprise avec candeur. [n'est-ce pas antinomique ? Rien à loutre.] Ma confiance en moi me rend parfois abjecte, qualité décuplée l'alcool faisant.
Je comprends ceux dont les commerces sont fermés, ceux qui n'en voient pas le bout, ceux qui souhaitent travailler quoi, merde à la fin. -Et moi qui rêve d'être confinée et d'arrêter, Netflix and chill Häagen-Dazs dans mon pyj en pilou-
Yep, certains secteurs ne se sont jamais arrêtés. Parlons donc du soin, qu'il soit de l'ordre de l'aide ou de la vie, de la survie en ce temps de crise terrible et pernicieuse, n'ayons pas peur des mots. Il y a ceux qui pleurent pour travailler et ceux qui pleurent en cessant de compter les morts, fatigués des centaines dépassées depuis belle lurette. Et toutes ces familles à consoler, tous ceux qui n'ont pas dit au revoir à leurs proches, parti d'un jour à l'autre, sans dire mot. Sans étreinte, sans je t'aime. Qui pense à eux ? Qui pense à tous ces corps envoyés au trou sans les us et coutumes, sans le respect que notre civilisation à donné aux morts. Peut-être un peu trop pompeux et larmoyant, mais quand même, ça fait partie de nos traditions. Merde. Encore. Ils n'y auront pas eu droit.
Leur dernière révérence s'est faite dans l'errance.
Va, petite âme, devient libre.
Je vais vous parler d'un milieu que je connais. Je vais vous parler des vieillards que je protège en cessant de vivre pour moi. En cessant les déplacements, petits ou grands, en ayant évité de rentrer dans mon pays natal, là où mes proches avaient pourtant besoin de moi. Ma copine Alysson, notamment, qui a mis fin à ses jours (vous allez finir par vous en souvenir), que j'aurais dû serrer dans mes bras à 2 semaines près. À un confinement près.
Je travaille avec des personnes fragiles, évidemment j'ai peur d'être vecteur du virus, celui-ci étant invisible. Je fais partie de ceux qui pensent que cesser de vivre par peur de mourir est une hérésie, mais dois-je en faire payer le prix à ceux qui m'entourent ? Même s'ils savent que la vie n'est pas éternelle, ils n'ont cependant pas envie de mourir de cette manière. Et je les comprends. Qui pense à eux ?
Qui pense aux soignants épuisés, luttant depuis bientôt une année comme des forcenés ? La question n'est plus de l'ordre de la place disponible dans les hôpitaux, ni même du salaire de ceux y exerçant, la question est simplement "on s'en sort quand ?", pas des restrictions, non, de la mort qui prend trop de place dès lors qu'on lâche du lest. À ces soignants qui ne souhaitent que de se reposer et laver leurs âmes de toutes les vies qu'ils ont vu s'évanouir comme des kilomètres de dominos, emportés par un ouragan de souffrance, d'incompréhension et de solitude extrême.
Il ne s'agit pas de museler la société, il s'agit de la protéger. Il ne s'agit pas d'idéologie, il s'agit de faits. Anectode croustillante : une dame chez qui j'interviens n'est pas sortie de chez elle depuis le mois de mars. Nous sommes bientôt en février. T'as compté ? 11 mois. Onze mois sans sorties, sans cafés partagés, sans balades régénératrices. Onze mois qu'elle se protège de ses proches, de ceux qu'elle aime. Pendant que tu manifeste contre des mesures que tu ne prends même pas le temps de comprendre, plusoyant les actes de révolution prodigués par nos prédécesseurs. Pendant que des humains pleurent leurs proches qui crèvent, un tuyau dans la gorge.









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